Comme on le voit sur Conseiller le 14 octobre 2024 | Image: Freepik
L’hypothèse de l’efficience du marché repose sur la correspondance entre le cours boursier de l’entreprise et sa juste valeur marchande. Puisque tout le monde a accès à la même information publique, les renseignements pertinents sont pris en compte et reflétés dans le cours boursier en vigueur. Si on accepte ce raisonnement, il n’existe pas d’actions sous-évaluées ou surévaluées et les investisseurs n’ont aucun intérêt à fouiller pour trouver des façons de dégager un rendement supérieur à celui du marché général.
Or, la réalité n’est pas telle et bon nombre d’investisseurs remettent en question cette théorie. Comme certains d’entre eux remportent, sur une base constante, des rendements supérieurs à ceux du marché dans son ensemble, cette notion d’efficience du marché cesse de tenir la route. Donc, pour ces investisseurs en quête de surperformance, il importe d’explorer les zones d’inefficience du marché.
Il est vrai que certaines parties du marché fonctionnent mieux que d’autres. Les indices d’actions à grande capitalisation, par exemple, ont tendance à être plutôt efficaces. Chaque jour, des millions d’opérateurs de marché et d’analystes font le suivi de ces grandes entreprises. Ils se penchent sur les rapports annuels et trimestriels, participent aux conférences et produisent eux-mêmes des tonnes de rapports. De là en découle un degré plus élevé d’efficience. Il y a énormément d’information qui circule au sujet de ces sociétés et leurs cours boursiers en tiennent compte. Toutefois, le marché est également parsemé de zones négligées, illiquides et moins efficaces : là, les cours boursiers ne font pas nécessairement état de la valeur réelle de l’entreprise.
La popularité croissante des stratégies passives ou indicielles a donné lieu à une plus grande inefficience du marché. Les fonds indiciels doivent se plier à certaines restrictions, notamment sur le plan de la capitalisation boursière des entreprises constituant l’indice, ou encore de l’exigence d’acheter toutes les entreprises représentant un secteur, sans égard à leurs cours boursiers actuels. Ce mépris pour le prix signifie que les fonds indiciels pondérés selon la capitalisation boursière peuvent englober des actions de sociétés dont le cours a grimpé considérablement et qui, de ce fait, occupent alors une portion démesurée dans le panier d’avoirs. Le produit s’en retrouve dès lors beaucoup moins diversifié que souhaité. En outre, il y a des fonds communs de placement dont l’objectif consiste à reproduire certains indices. Lorsqu’une société est ajoutée ou retirée d’un indice, ces fonds doivent vendre ou acheter les actions de celle-ci pour imiter fidèlement la composition indicielle. Or, ces décisions de nature transactionnelle ne s’appuient pas sur les mérites de la société, mais sur une exigence administrative. Cela pourrait entraîner un écart de prix entre la valeur de l’entreprise et son cours actuel.
L’inefficience peut également montrer le bout de son nez dès qu’on note une asymétrie sur le plan de l’information. Par exemple, les entreprises de plus petite taille dirigée par leur propriétaire risquent de faire l’objet d’un suivi très sporadique par le marché. Peu de personnes auront entendu parler de la société si aucun analyste n’y prête attention ou ne produit un rapport de placement sur elle. Cependant, les propriétaires et les cadres supérieurs eux en savent long sur les perspectives de croissance de l’entreprise, mais ces données ne sont pas reflétées dans le cours boursier. Les sociétés peu suivies par les analystes et les médias financiers peuvent donc se révéler une occasion lucrative, car, au fur et à mesure que l’entreprise gagne ses lettres de noblesse et fait l’objet d’un suivi plus assidu, l’écart sur les prix se referme. Et c’est là, probablement, une des raisons qui expliquent la surperformance des petites entreprises par rapport aux grandes à long terme.
Certaines entreprises sont mal comprises, ce qui rend difficile la tâche, pour l’investisseur moyen, d’en déterminer la juste valeur. Prenons l’exemple d’une société qui possède des affaires plus traditionnelles et un nouveau segment d’affaires. La croissance du segment traditionnel pourrait ralentir et ainsi masquer le taux de croissance du nouveau segment. Par conséquent, les investisseurs qui ne prennent pas le temps de bien comprendre les forces relatives des différents segments de l’entreprise pourraient mal interpréter la valeur de la compagnie.
Tout le monde veut être apprécié, et les entreprises ne font pas exception à la règle! Certaines entreprises ou certains secteurs peuvent être négligés par les investisseurs pour une multitude de raisons. Le secteur du cannabis, par exemple, a d’abord été chouchouté pour maintenant être snobé, les investisseurs y ayant perdu intérêt. Le secteur énergétique a longtemps été mal aimé, mais à l’heure actuelle, il suscite de nouveau l’enthousiasme des investisseurs. Au sein de chacun de ces groupes malmenés, on retrouve des entreprises de très grande qualité.
Prudence cependant : même les compagnies les plus excellentes peuvent être boudées et mal évaluées pendant de longues périodes. Il faut en somme un élément catalyseur pour faire bouger les choses et réduire l’écart de prix. Ces facteurs peuvent être internes ou externes. Du côté des éléments catalyseurs externes, on pensera aux acquisitions ou fusions, à une plus grande couverture des analystes, à un actionnaire important lançant une lutte par procuration ou à tout autre type d’événement exogène. En revanche, du côté interne, on pourrait donner l’exemple d’une manœuvre de mobilisation des capitaux par la direction pour faire ressortir la valeur de l’entreprise.
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