Stephen Poloz s’entretient avec Pender sur son nouveau livre, The Next Age of Uncertainty – Partie 1

Aout 3, 2022
Rédigé par PenderFund
Stephen Poloz s’entretient avec Pender sur son nouveau livre, The Next Age of Uncertainty – Partie 1

Dans cette première de deux parties, Stephen Poloz, conseiller spécial à Osler et ancien gouverneur de la Banque du Canada, discute de la volatilité économique qui nous attend au tournant et des cinq mouvements tectoniques qui l’alimentent. 

Pourquoi intituler le livre The Next Age of Uncertainty 

Dans les années 1970, l’économie comme domaine professionnel a été fortement remise en question, les économistes d’alors n’arrivant pas à jeter la lumière sur ce qui se passait. Il s’agissait là en gros de la thèse du livre de Galbraith intitulé The Age of Uncertainty. À la fin des années 1970 et au début des années 1980, soit les années pendant lesquelles je faisais mes études supérieures, l’économie et la macroéconomie ont fait l’objet de révisions importantes, notamment sur le plan de la modélisation des prévisions de l’inflation. J’avance et maintiens que ce sont des forces importantes, opérant tout juste sous la surface, qui ont rendu les années 1970 si difficiles et délicates. L’OPEP et la hausse du prix du pétrole n’étaient pas les seuls en cause. Les raisons étaient beaucoup plus profondes. Parmi elles, et la plus importante, la situation démographique : on se trouvait en pleine explosion causée par le baby-boom des années 60, soit ma génération. Ainsi, ce grand plateau de main-d’œuvre en pleine croissance s’est révélé une force perturbatrice d’envergure. C’était d’ailleurs une des raisons qui a poussé Galbraith à écrire The Age of Uncertainty

Dans mon livre, j’émets une hypothèse similaire : ce sont certains de ces mêmes courants démographiques qui agissent ici à nouveau, et de manière importante. C’est pourquoi j’ai intitulé mon livre The Next Age of Uncertainty. J’ai évité de l’appeler The New Age of Uncertainty, car ça aurait semblé itératif – en parlant de la « prochaine ère de l’incertitude », on comprend qu’il ne s’agit probablement pas de la dernière. Nous avons au moins 30 ans d’incertitude qui nous attend. Et ce seront des années difficiles.  

Dans le livre, vous parlez des cinq secousses tectoniques qui, selon vous, alimenteront la volatilité économique de demain, soit le vieillissement de la population, l’innovation technologique, les inégalités croissantes, l’endettement et le changement climatique. Certaines de ces forces vivent-elles un moment charnière qui pourrait engendrer un avenir bien différent de celui auquel on s’attend? 

On connaît bien certaines des forces à l’œuvre, celles qui opèrent depuis longtemps, comme l’accroissement de l’endettement. Par contre, la transition à la consommation énergétique nette zéro, ça c’est nouveau. Nous ne savons pas comment, d’ici l’année 2050, on y parviendra. Elle représente par ailleurs une source d’incertitude très appréciable. J’ai parlé plus tôt de la démographie; c’est aussi un facteur des plus importants. L’évolution technologique en est un autre qui ne donne pas sa place; elle nous semble se réaliser tous les jours. Or en réalité, les nouvelles technologies à des fins générales ne se manifestent pas tout le temps comme ça, au contraire. Jusqu’à tout récemment dans notre histoire, on ne comptait que trois révolutions industrielles : la machine à vapeur, l’électrification et la puce informatique. Ces technologies sont utilisées partout et pour tout. Elles ne sont pas cette chose unique et nouvelle. Nous sommes maintenant arrivés à la quatrième révolution industrielle : la numérisation.  

Elle a un réel impact et des répercussions sur tout, et sera mise au service de la robotique, de l’intelligence artificielle et de la biotechnologie. Nous avons assisté à sa mise en place aux premières loges pendant la pandémie : les ordinateurs ont travaillé pendant trois mois, sans arrêt, pour déterminer le code génétique du virus puis, une fois trouvé, un vaccin a été mis au point en moins de 48 heures. Ce sont les ordinateurs et l’intelligence artificielle qui ont fait tout le travail ici. Ces progrès seront probablement encore plus notables que ceux engendrés par la puce informatique. Notons aussi qu’il avait fallu près de 20 ans pour mettre complètement au point et en œuvre la puce. Les avantages de cette productivité n’ont été ressentis qu’au courant de la deuxième décennie.  

« La numérisation s’installe depuis cinq ans environ et je m’attends à ce que ses effets soient encore plus prononcés que ceux de la puce informatique. »

La numérisation s’installe depuis cinq ans environ et je m’attends à ce que ses effets soient encore plus prononcés que ceux de la puce informatique. Grâce aux modèles biologiques, d’ingénierie et économiques, nous savons qu’une relation entre deux éléments en mouvement peut entraîner une interaction très surprenante – si les mouvements ne sont pas linéaires. 

Le principe mathématique derrière cette idée s’intitule « la théorie mathématique du chaos ». On parle de « chaos », car les issues et les résultats sont complètement inexplicables. C’est le même phénomène qui se produit lorsque vous vous trouvez dans un avion, au beau milieu de l’Atlantique, et que les conditions météo sont au beau fixe : tout à coup, vous vous retrouvez ceinture bouclée en raison d’une forte turbulence, ce qu’on appelle « la turbulence en ciel clair ». Les non-linéarités interagissent de façon entièrement imprévisible et c’est ce qui explique cette situation.  

Même chose lorsqu’une personne en pleine forme physique, comme un coureur de marathon, décède soudainement. On en cherche la cause, mais sans succès. Il n’y a aucune raison physiologique qui explique cette mort. Puis les chercheurs creusent et découvrent que cette personne avait reçu un diagnostic de SSPT il y a quatre ans et commencent ainsi à soupçonner un lien plus profond. Sa mort serait considérée comme un « cygne noir », un événement qu’on ne peut pas expliquer, car sa causalité sous-jacente n’est pas comprise. C’est donc ce que je tente d’exposer ici : lorsque les choses bougent toutes en même temps, la volatilité devient incommensurable.  

Pourquoi est-ce important de changer notre façon de concevoir la hausse de la volatilité à l’avenir? 

Dans le livre Le cygne noir, Nassim Taleb avance qu’en présence d’un événement considéré comme tel, le fonctionnement de la pensée est modifié pour toujours. À partir de là, cet événement devient une possibilité et s’inscrit dès lors dans le processus d’évaluation du risque. 

Exemple à l’appui : la crise financière mondiale. Les gens disaient : « Nous avons le système bancaire le plus sécuritaire au monde et bla-bla-bla ». Puis la crise a frappé. Il a alors fallu modifier le système au complet afin d’éviter qu’une telle situation se présente à nouveau. Aujourd’hui, certains se demandent s’il y aura une récession l’année prochaine. Mais personne ne connaît la réponse – il y a tant de choses qu’on ne sait pas! La vraie question qu’on devrait se poser est la suivante : « Dois-je me préparer en prévision d’une éventuelle récession au cours des quelques prochaines années? » Et la réponse à cette question est « oui ». C’est comme savoir que les risques de pluie sont de 40 %. Vous prenez votre parapluie avec vous, mais vous n’annulez pas votre partie de golf. Que vous soyez un gestionnaire ou une entreprise en placement, vous vous préparez à toute une multitude de possibilités en raison d’une forte probabilité de volatilité exacerbée. Les risques doivent être activement gérés afin qu’advenant leur survenue, ceux-ci puissent être transformés en valeur. Et si vous pouvez gérer les risques mieux que les autres, vous obtenez ainsi une avance sur la concurrence.

Regardez quelques faits saillants de notre discussion avec Stephen Poloz (en anglais)

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